"lettre à une maîtresse d'école"

Don LORENZO MILANI, prêtre italien, de 1954 à 1967, dans un village déshérité des Toscane, créait une école exceptionnelle et dérangeante.

La hiérarchie catholique italienne se débarrassait en 1954 d'un prêtre un peu trop remuant en l'envoyant à Barbiana, village perdu des montagnes de Toscane, sans eau, sans électricité et bien sûr sans école. Immédiatement Don LORENZO crée une école... en plein air. D'abord 6 élèves s'y présentent, puis 12, puis 20 .... Tous les rejetés du système scolaire des environs viennent à Barbiana parce qu'elle représente un réel espoir.

On n'y faisait pas l'école comme ailleurs. "On pouvait travailler 12 heures par jours, 363 jours sur 365". Les enfants y organisent leurs études avec Don Lorenzo. On se sert de tout, des journaux avec lesquels an apprend à lire mais aussi qu'on apprend à critiquer, on construit, an invente, on travaille seul, à 2, â plusieurs, chacun enseigne aux autres... L'étude cesse d'être une corvée. On ne s'arrête même pas aux études obligatoires à l'école primaire. Bien que prêtre catholique, Don Lorenzo est résolument "du côté des pauvres" et il n'hésite pas à braver la hiérarchie catholique qui trouve que les enfants qui sortent de Barbiana un peu trop citoyens.

Quelques mois avant sa mort ses élèves écrivent un livre "Lettre à une maîtresse d'école" (éd Mercure de France 1967), véritable réquisitoire contre une école et une culture de classe, livre qui immédiatement est un best-seller.

"En me rendant une dissertation à laquelle vous auriez mis 4, vous m'avez dit un jour : "On naît écrivain, on ne le devient pas". Mais en attendant vous recevez un traitement tous les mois pour enseigner l'italien. L'idée de génie est une invention bourgeoise qui tient à la fois du racisme et de la paresse. Certes, en politique aussi il est plus difficile de démêler le mécanisme complexe des partis que de prendre un De Gaulle et de dire que c'est un génie qui incarne la France.

C'est comme ça que vous faites avec l'italien. Pierino n'a pas besoin de s'y reprendre à deux fois avant d'écrire. II écrira des livres comme tous ceux qui circulent. Des livres de 500 pages qu'on pourrait réduire à 50 sans qu'il manque une seule idée. Moi je n'ai qu'à prendre mon mal en patience et à retourner dans mes forêts. Vous, vous pourrez continuer à vous tourner les pouces dans votre chaire et à faire des petites marques sur votre cahier de notes"